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CE : Requêtes des syndicats de MMO & des Ordres rejetées

Créé le : vendredi 26 juillet 2013 par Jean Louis Boutin

Dernière modificaton le : vendredi 29 octobre 2021

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Conseil d’État

N° 347291  
ECLI:FR:CESSR:2013:347291.20130717
Inédit au recueil Lebon
1re et 6e sous-sections réunies
M. Gaël Raimbault, rapporteur
M. Alexandre Lallet, rapporteur public

Lecture du mercredi 17 juillet 2013
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu 1°, sous le n° 347291, la requête, enregistrée le 7 mars 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par le syndicat de médecine manuelle - ostéopathie de France dont le siège est 79, rue de Tocqueville à Paris (75017), représenté par son président ; le syndicat demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2011-32 du 7 janvier 2011 relatif aux actes et aux conditions d’exercice de la chiropraxie, ainsi que l’arrêté du 7 janvier 2011 relatif à la composition du dossier et aux modalités de l’organisation de l’épreuve d’aptitude et du stage d’adaptation ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 2°, sous le n° 347321, la requête enregistrée le 8 mars 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée par le syndicat national des médecins ostéopathes, dont le siège est 148, boulevard Malesherbes à Paris (75017), représenté par sa présidente ; le syndicat demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2011-32 du 7 janvier 2011 relatif aux actes et aux conditions d’exercice de la chiropraxie ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 3°, sous le n° 347354, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 9 mars et 9 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés par l’association nationale française de patients pour la défense de la chiropratique, dont le siège est 47, avenue Saint-Pol à Reims (51100), représentée par son président ; l’association demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2011-32 du 7 janvier 2011 relatif aux actes et aux conditions d’exercice de la chiropraxie ;
2°) de condamner l’Etat à lui verser une indemnité de 7 000 euros en réparation du préjudice qu’elle estime avoir subi en raison du délai écoulé entre l’adoption de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 et celle du décret du 7 janvier 2011, qui était indispensable à la mise en oeuvre de son article 75 ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 4°, sous le n° 349993, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 8 juin et 8 septembre 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour le Conseil national de l’ordre des médecins, dont le siège est 180, boulevard Haussmann à Paris (75389), représenté par son président ; le conseil national demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2011-32 du 7 janvier 2011 relatif aux actes et aux conditions d’exercice de la chiropraxie, ainsi que la décision du 13 avril 2011 par laquelle le ministre du travail, de l’emploi et de la santé a rejeté sa demande tendant au retrait de ce décret ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu 5°, sous le n° 350269, la requête, enregistrée le 21 juin 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentée pour le Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes, dont le siège est 120-122 rue Réaumur à Paris (75002), représenté par son président ; le Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2011-32 du 7 janvier 2011 relatif aux actes et aux conditions d’exercice de la chiropraxie, ainsi que la décision du 21 avril 2011 par laquelle le ministre du travail, de l’emploi et de la santé a rejeté sa demande tendant au retrait de ce décret ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Constitution, et notamment son préambule ;
Vu le traité sur l’Union européenne ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, et notamment son article 2 ;
Vu le code de la consommation ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;
Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Gaël Raimbault, Maître des Requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat du Conseil national de l’ordre des médecins et à la SCP Hémery, Thomas-Raquin, avocat du Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes ;

1. Considérant que l’article 75 de la loi du 4 mars 2002, relatif à l’usage professionnel du titre d’ostéopathe ou de chiropracteur, renvoie à des décrets le soin de déterminer les conditions dans lesquelles ce titre peut être utilisé, celles dans lesquelles les praticiens qui exercent à la date d’entrée en vigueur de la loi peuvent se voir reconnaître le titre d’ostéopathe ou de chiropracteur, la liste des actes que ces praticiens sont autorisés à effectuer ainsi que les modalités selon lesquelles ils peuvent les accomplir ; que son avant-dernier alinéa dispose notamment que : " Un décret établit la liste des actes que les praticiens justifiant du titre d’ostéopathe ou de chiropracteur sont autorisés à effectuer, ainsi que les conditions dans lesquelles il sont appelés à les accomplir " ; que le décret du 7 janvier 2011 relatif aux actes et aux conditions d’exercice de la chiropraxie a été pris à ces fins ; que les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre ce décret ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la légalité externe du décret attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu’il ne résulte ni de l’article L. 4122-1 du code de la santé publique, ni de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002, ni d’aucune autre disposition législative ou réglementaire que le projet de décret aurait dû être soumis à la consultation du Conseil national de l’ordre des médecins ni du Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes ;

3. Considérant que si l’article L. 4127-1 du même code charge le Conseil national de l’ordre des médecins de préparer le code de déontologie médicale et si l’article L. 4321-14 prévoit que l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes " peut être consulté par le ministre chargé de la santé, notamment sur les questions relatives à l’exercice de la profession de masseur-kinésithérapeute ", le décret attaqué ne comporte aucune disposition qui eût exigé, en vertu des ces dispositions, la consultation de ces deux ordres ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que ni l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 ni aucune autre disposition ne prévoient que les décrets pris pour l’application de cet article doivent être précédés d’un avis de l’Académie nationale de médecine ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu’il ressort de la copie de la minute de la section sociale du Conseil d’Etat, telle qu’elle a été produite au dossier par le ministre, que le texte publié ne contient pas de disposition différente à la fois du projet initial du Gouvernement et du texte adopté par le Conseil d’Etat ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que le projet de décret a été soumis à l’avis de la Haute Autorité de santé en application du 5° de l’article R. 161-72 du code de la sécurité sociale, qui impose une telle consultation pour tout projet de mesure réglementaire prise pour l’application de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 ; que s’il ressort des pièces du dossier que la Haute Autorité de santé n’a pas été consultée sur le 3° de l’article 4 du décret attaqué, qui prévoit que peuvent faire usage du titre de chiropracteur certains professionnels de santé titulaires d’un diplôme universitaire sanctionnant une formation suivie en chiropraxie, cet ajout ne constituait pas à lui seul une question nouvelle qui aurait justifié une nouvelle consultation ; que la circonstance qu’un délai de six mois se soit écoulé entre son avis et l’adoption du décret attaqué n’est pas de nature à entacher ce dernier d’irrégularité, en l’absence de changement de circonstance de fait ou de droit imposant une nouvelle consultation ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la Haute Autorité de santé n’aurait pas été régulièrement consultée doit être écarté ;

7. Considérant, en cinquième lieu, qu’il résulte des dispositions combinées des articles D. 4381-1 et D. 4381-2 du code de la santé publique que le Haut Conseil des professions paramédicales doit être consulté sur : " a) Les conditions d’exercice des professions paramédicales, l’évolution de leurs métiers, la coopération entre les professionnels de santé et la répartition de leurs compétences ; / b) la formation et les diplômes ; (...) " ; que les dispositions du décret attaqué portent sur les actes que peuvent accomplir les chiropracteurs, qui ne constituent pas une profession paramédicale ; que la circonstance que certains professionnels paramédicaux peuvent se voir reconnaître la possibilité d’user du titre de chiropracteur ne saurait suffire à ce que le décret attaqué soit regardé comme portant sur les conditions d’exercice, l’évolution des métiers, la formation ou les diplômes de ces professionnels ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le Haut Conseil des professions paramédicales aurait dû être consulté ne peut qu’être écarté ;

8. Considérant, en septième lieu, que le décret attaqué a été contresigné par le ministre de la justice ; que la circonstance que ce contreseing n’aurait pas été exigé par les dispositions de l’article 22 de la Constitution est sans incidence sur la légalité du décret ;

Sur la légalité interne du décret attaqué :

En ce qui concerne les moyens tendant à l’annulation de l’ensemble du décret :

Quant au moyen tiré de la méconnaissance du droit à la protection de la santé et du droit à la vie :

9. Considérant, en premier lieu, que le décret attaqué n’ayant pas pour objet de définir le contenu de la formation des chiropracteurs, les moyens tirés de ce que ces derniers ne disposeraient pas d’une formation suffisante pour procéder à l’orientation prévue par son article 2 et de ce que leurs conditions de formation ne sont pas définies sont inopérants ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que la Haute Autorité de santé n’ait pas adopté les recommandations de bonne pratique prévues par l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 n’est pas susceptible d’entacher d’illégalité le décret attaqué, dès lors que la loi n’impose pas que l’entrée en vigueur d’un tel décret soit subordonnée à l’adoption de ces recommandations ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu’aucune disposition du décret litigieux n’a pour objet ni ne saurait avoir pour effet de déroger aux dispositions des articles L. 1111-2 et L. 1111-4 du code de la santé publique ; qu’au demeurant, l’article 21 du décret attaqué dispose que : " Les praticiens justifiant du titre de chiropracteur doivent s’interdire de faire courir un risque injustifié à la personne prise en charge, dont le consentement éclairé doit être recherché dans tous les cas. Ils informent cette personne des risques possibles des manipulations ou des mobilisations cervicales qu’ils envisagent de réaliser " ;

12. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le pouvoir réglementaire aurait méconnu la portée du onzième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 ainsi que le droit à la vie garanti par l’article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ne peut qu’être écarté ;

Quant aux moyens tirés de la méconnaissance des principes d’égalité, de non-discrimination et de libre choix du patient :

13. Considérant, en premier lieu, que les chiropracteurs qui ne sont pas professionnels de santé ne sont pas placés dans la même situation que ceux qui sont, par ailleurs, des professionnels de santé ; que, dès lors, en ne prévoyant pas, pour les chiropracteurs relevant des seules dispositions de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002, d’encadrer, dans des conditions comparables à celles qui s’imposent aux professionnels de santé, leur recours à la publicité, la fixation de leurs tarifs ou leurs obligations d’assurance, le pouvoir réglementaire n’a pas, en tout état de cause, méconnu le principe d’égalité ;

14. Considérant, en deuxième lieu, qu’il résulte de la loi elle-même, notamment des dispositions de l’article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, que l’assurance maladie obligatoire ne saurait prendre en charge que les actes réalisés par des professionnels de santé ; que, contrairement à ce qui est soutenu, le décret litigieux ne pouvait dès lors prévoir que les actes réalisés par des chiropracteurs qui ne sont pas des professionnels de santé seraient pris en charge par l’assurance maladie ;

15. Considérant, enfin, qu’aux termes du 1° du 4. de l’article 261 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige, sont exonérés de taxe sur la valeur ajoutée : " Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées, par les praticiens autorisés à faire usage légalement du titre d’ostéopathe et par les psychologues, psychanalystes et psychothérapeutes titulaires d’un des diplômes requis, à la date de sa délivrance, pour être recruté comme psychologue dans la fonction publique hospitalière ainsi que les travaux d’analyse de biologie médicale et les fournitures de prothèses dentaires par les dentistes et les prothésistes " ; que le décret attaqué ne pouvait étendre aux actes réalisés par les chiropracteurs à titre exclusif les dispositions dont le champ d’application était ainsi défini par la loi ;

Quant aux autres moyens :

16. Considérant, en premier lieu, que le décret attaqué n’a ni pour objet ni pour effet d’écarter l’application des dispositions législatives du code de la consommation qui proscrivent les pratiques de concurrence déloyale ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu’être écarté ;

17. Considérant, en deuxième lieu, que, ainsi qu’il a été dit, le décret attaqué a été pris sur le fondement de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002, qui a pour objet d’encadrer la pratique de la chiropraxie ; que, par suite, les requérants ne sauraient soutenir que le pouvoir réglementaire aurait méconnu la loi, porté atteinte à la sécurité juridique et commis une erreur manifeste d’appréciation, au motif qu’il se serait borné à définir les actes que peuvent accomplir les chiropracteurs et les conditions dans lesquelles ils peuvent les accomplir, sans définir la " chiropraxie " et sans retenir la notion de " chiropratique " ;

18. Considérant, en troisième lieu, que les " Principes directeurs pour la formation de base et la sécurité en chiropratique ", publiés par l’organisation mondiale de la santé en 2005, n’ont qu’une visée documentaire et indicative et sont dénués de portée juridique ; qu’il en va de même des normes de qualité des pratiques reconnues par les instances professionnelles internationales propres aux chiropracteurs ; qu’aucune disposition ni aucun principe n’imposent par ailleurs au Premier ministre de fixer le contenu ou la durée de la formation en France en s’inspirant de ceux qui sont retenus par d’autres Etats ; que, par suite, les moyens tirés de ce que le pouvoir réglementaire aurait méconnu ces principes, ces normes ou ces législations sont inopérants ;

19. Considérant, en quatrième lieu, que si les requérants soutiennent que le décret attaqué serait entaché d’erreur manifeste d’appréciation en ce qu’il ne qualifie pas de professionnels de santé les chiropracteurs ne disposant pas d’un titre, d’un diplôme ou d’une autorisation leur donnant cette qualité, il résulte de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 précité que les chiropracteurs à titre exclusif n’ont pas le statut de professionnels de santé, tel que défini par les livres Ier et III de la quatrième partie du code de la santé publique ;

En ce qui concerne les dispositions des articles 1er à 3 :

20. Considérant que, selon l’article 1er du décret attaqué, les actes de chiropraxie sont destinés à prévenir les troubles de l’appareil locomoteur du corps humain et leurs conséquences et à y remédier ; qu’ils consistent en des manipulations et mobilisations manuelles, instrumentales ou assistées mécaniquement, directes et indirectes, avec ou sans vecteur de force ; qu’il est spécifié que ces manipulations ne peuvent être que neuro-musculo-squelettiques et exclusivement externes ; que les pathologies organiques qui nécessitent une intervention thérapeutique, médicale, chirurgicale, médicamenteuse ou par agents physiques sont explicitement exclues des actes de chiropraxie ; que les praticiens autorisés à user du titre de chiropracteur peuvent en outre prodiguer des conseils ou user de techniques non invasives, conservatrices et non médicamenteuses à visée antalgique ; que l’article 2 du décret oblige les chiropracteurs qui n’ont pas la qualité de médecin à orienter leur patient vers un médecin lorsqu’un diagnostic ou un traitement médical apparaît nécessaire, qu’une dégradation de l’état de santé du patient est constatée ou que les symptômes excèdent leur champ de compétences ; qu’enfin, l’article 3 interdit aux chiropracteurs n’ayant pas la qualité de médecin ou de professionnel de santé habilité à effectuer de tels actes dans le cadre des dispositions qui régissent l’exercice de leur profession de pratiquer des manipulations gynéco-obstétricales et des touchers pelviens ; que ce même article ne les autorise à manipuler le crâne, la face et le rachis chez le nourrisson de moins de six mois qu’après un diagnostic établi par un médecin attestant de l’absence de contre-indication médicale à la chiropraxie ; qu’il ne les autorise à pratiquer des manipulations du rachis qu’en l’absence de certains signes cliniques ou de contre-indications, qui sont listés en annexe au décret ;

21. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il résulte de l’ensemble de ces dispositions, compte tenu de leur précision, que le décret attaqué établit, ainsi que le lui imposait la loi, la liste des actes que les professionnels justifiant du titre de chiropracteur sont autorisés à effectuer, ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont appelés à les accomplir ;

22. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions des articles 1er et 2 du décret attaqué n’ont ni pour objet ni pour effet d’habiliter les chiropracteurs qui n’ont pas la qualité de médecin, en méconnaissance de l’article L. 4161-1 du code de la santé publique relatif à la répression de l’exercice illégal de la médecine, à établir un diagnostic ; que, contrairement à ce qui est soutenu, le législateur n’a pas subordonné la possibilité d’effectuer des actes de chiropraxie à un diagnostic médical préalable non plus qu’à une prescription médicale systématique ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les articles 1er à 3 du décret attaqué méconnaîtraient la portée de l’article L. 4161-1 du code de la santé publique ou de l’arrêté du 6 janvier 1962, pris sur le fondement de cet article, fixant la liste des actes médicaux qui ne peuvent être pratiqués que par des médecins ;

23. Considérant, en troisième lieu, d’une part, qu’il appartenait au pouvoir réglementaire de réglementer l’activité des chiropracteurs en prenant notamment en compte les exigences liées à la protection de la santé publique ; qu’en leur interdisant de pratiquer les actes énumérés au I de son article 3, il n’est pas allé au-delà de ce qui était nécessaire au respect de ces exigences ; qu’en autorisant, au II de son article 3, le praticien justifiant d’un titre de chiropracteur à n’effectuer des manipulations du crâne, de la face et du rachis chez le nourrisson de moins de six mois qu’après un diagnostic établi par un médecin attestant de l’absence de contre-indication médicale à la chiropraxie et en subordonnant la réalisation d’actes de manipulation du rachis à l’absence de certains signes cliniques ou de contre-indications, il n’a pas méconnu les dispositions de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 et n’a entaché le décret attaqué d’aucune erreur manifeste d’appréciation ; qu’eu égard aux différences de formation et d’exigences déontologiques entre les chiropracteurs exclusifs et ceux qui sont, par ailleurs, professionnels de santé, il n’a pas non plus méconnu le principe d’égalité en ne reconnaissant pas les mêmes compétences à ces deux catégories de professionnels ; que le détournement de pouvoir allégué n’est pas établi ;

24. Considérant, enfin, que les moyens selon lesquels le pouvoir réglementaire aurait porté atteinte au principe de précaution ou au principe de protection de la santé publique ne sont, en tout état de cause, pas assortis des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé et, par suite, ne peuvent qu’être écartés ;

En ce qui concerne les dispositions des articles 6 à 19 :

25. Considérant que le moyen tiré de ce que ces articles, qui déterminent les conditions dans lesquelles les ressortissants d’un Etat membre de l’Union européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen pourront être autorisés à faire un usage professionnel du titre de chiropracteur en France, méconnaîtraient la liberté de circulation garantie par le traité instituant l’Union européenne, n’est pas assorti des précisions permettant d’en apprécier la pertinence et, par suite, ne peut qu’être écarté ;

Sur les autres conclusions :

26. Considérant, en premier lieu, que les conclusions présentées par le syndicat de médecine manuelle - ostéopathie de France tendant à l’annulation de l’arrêté du 7 janvier 2011 relatif à la composition du dossier et aux modalités de l’organisation de l’épreuve d’aptitude et du stage d’adaptation ne sont assorties d’aucun moyen ; qu’elles doivent être regardées comme demandant l’annulation de cet arrêté par voie de conséquence de celle du décret litigieux et, par suite, ne peuvent qu’être rejetées ;

27. Considérant, en second lieu, que les conclusions présentées par l’association nationale française de patients pour la défense de la chiropratique tendant à ce que soit mise en cause la responsabilité de l’Etat ne sont assorties d’aucune précision permettant d’apprécier le caractère direct et certain du préjudice qui résulterait pour ladite association du retard pris par l’Etat pour l’adoption du décret attaqué ; que, par suite, ces conclusions ne peuvent qu’être rejetées ;

28. Considérant, enfin, que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l’État, qui n’est pas la partie perdante, les sommes demandées par les requérants ;

Décide

Article 1er : Les requêtes du syndicat de médecine manuelle-ostéopathie de France, du syndicat national des médecins ostéopathes, de l’association nationale française de patients pour la défense de la chiropratique, du Conseil national de l’ordre des médecins et du Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat de médecine manuelle-ostéopathie de France, au syndicat national des médecins ostéopathes, à l’association nationale française de patients pour la défense de la chiropratique, au Conseil national de l’ordre des médecins et au Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes, ainsi qu’au Premier ministre et à la ministre des affaires sociales et de la santé.

=> Lire l’arrêt du Conseil d’État sur le site de Légifrance



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