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Anklärung : Espoir d’un âge adulte pour la médecine... (Rés)

Créé le : lundi 26 avril 2010 par Erich Degen

Dernière modificaton le : lundi 21 mai 2018

« ...la main qui guide le pinceau, au moment précis où l’esprit commence à élaborer des formes, a déjà trouvé et réalisé ce qui le hante et, en fin de compte, l’élève ignore si c’est la main où l’esprit qui a combiné l’oeuvre. »

Le Zen dans l’art chevaleresque du tir à l’arc. E.Herrigel.

 ► Introduction

Nombre d’historiens placent le début du vingtième siècle en 1914. Cette entorse à la stricte rationalité des chiffres exprime une vision sociologique de l’Histoire. La réalité phénoménale ici s’impose. La Grande Guerre (celle que j’préfère...) a plus profondément transformé la Société et la vie des Humains la composant que le Réveillon de la Saint-Sylvestre 1900-1901. C’est un fait.

De même, la fin de la parenthèse Napoléonienne en 1815 annonce le dix-neuvième siècle, scientifique, romantique et industriel, et la mort du Roi Soleil en 1715, le siècle des Lumières (il est mort, le Soleil ?).

C’est pourquoi, à l’orée de l’année 2009, je crois toujours possible de postuler les conditions de début du vingt-et-unième siècle. Ce serait un siècle sans Guerre, finalement ininterrompue depuis 1914 pour peu qu’on occupe le point de vue de la Terre dans son ensemble.

Ce ne serait que Justice, en réalité, après toutes ces morts indues. Dans quelles perspectives s’y développerait la Médecine ?

 ► A/Chirurgie

Avant d’envisager directement des réponses à cette question, il convient d’examiner quelle reste la perspective actuelle de la médecine moderne, à la toute fin, donc, de ce siècle de Guerre.

Pour cela, il nous faut nous intéresser de plus près à l’Histoire de la Chirurgie. C’est une histoire paradoxale à plus d’un titre dont la situation présente témoigne, situation qui n’aurait pu être envisagée il y a quelques siècles qu’au prix d’une imagination quasi-prophétique. Comment en effet prévoir que les chirurgiens bannis d’hier, très bons matériaux des bûchers médiévaux, deviendraient les chefs de file de la médecine moderne ? Et en quoi cela constitue-t-il un progrès pour cette même médecine ?

L’Histoire de la Chirurgie est restée pendant longtemps lettre morte. Armés de trop peu d’Anatomie, les Anciens – c’est à dire dans ce cas, d’Hippocrate jusqu’à la Renaissance – n’avaient que peu de chances d’éviter le carnage témoignant des balbutiements de l’art chirurgical.
La description de la « circulation sanguine » par Galien (voir chapitre 2) ne permettait pas une utilisation raisonnée du scalpel, et les résultats des opérations tentées dans ces temps antiques et médiévaux furent pour le moins aléatoires.

L’Église, dans nos régions occidentales, avait la mainmise sur tout ce qui touchait au corps humain.

En clair, elle interdisait de pratiquer des dissections, seules capables, des siècles plus tard, de faire s’effondrer le « dogme galénique » et de fonder en raison l’Anatomie. On aperçoit les conséquences de l’extrême dureté de ces conditions politiques. Le chirurgien d’avant le seizième siècle, le barbier, naviguait en plein brouillard. Pour certains, cependant, la brume se dissipa beaucoup plus tôt que pour d’autres.
Les onzième, douzième et treizième siècles virent ainsi évoluer, autour de la Méditerranée, à la suite de personnages tels que Rhazès, Avicenne, Averroès et Maïmonide, une médecine tolérée ou même favorisée par des souverains plus éclairés, qui ne craignait pas de s’opposer à la version fixe promulguée par Rome. La Science issue des Grecs tenait là sa tête de pont.

Là, des dissections furent réalisées et la recherche ne cessa pas. Et, trois cents ans avant Cerveto et Vésale, Ibn-Al-Nafis remit en question Galien en affirmant qu’il n’y avait rien d’autre dans les vaisseaux pulmonaires que du sang. L’air vivifiant de la Méditerranée venait de faire s’évaporer le pneuma.

On avait là les prémisses de la réalisation d’un rêve ancien : connaître, soigner et pouvoir vraiment guérir l’Homme. Même dans le système autoritaire qui prévalait en Europe jusqu’à la Renaissance, ces idées nouvelles se répandirent.

Ainsi comprend-on mieux le véritable bond manuel et conceptuel que représentent la découverte et l’utilisation des ligatures par Ambroise Paré, le père de la chirurgie moderne. Ambroise Paré se rendit utile, ô combien. Tellement indispensable que, lui même protestant au milieu des Guerres de Religion, il fut caché par le roi catholique Charles IX durant le Massacre de la Saint-Barthélémy. Grâce à Paré et à ses précurseurs arabo-judéo-andalous, c’était désormais acquis : les chirurgiens-barbiers, même incultes et ignorants du latin, rassuraient les puissants par leur présence, bien plus que les médecins savants, qui, au même moment et pour longtemps encore, pataugeaient. Carnages, résultats aléatoires, naviguer en plein brouillard, patauger, voilà alors une grande partie de l’histoire de la Médecine. C’est ce qu’allait progressivement chasser du décor la Chirurgie.

Ce qui s’élabora après Paré était un changement complet dans la hiérarchie des valeurs. Dans un premier temps, ce fut la prise de pouvoir de l’Anatomie. Tous les grands noms ou presque de la Médecine du XVIIe au XIXe siècle furent d’abord des anatomistes. Ils opéraient, c’est une chose, et surtout disséquaient les morts, apprenant ainsi à comprendre comment fonctionne et donc dysfonctionne le corps humain.

Les deux principaux progrès dans les domaines de l’anesthésie et de l’asepsie résumés dans cette phrase tirée du chapitre 5, « L’utilisation de l’éther comme anesthésique à partir de 1846 avait déjà, selon l’expression d’un chirurgien de l’époque « délivré notre métier pour toujours de son horreur », l’asepsie fait entrer la Chirurgie dans l’ère du résultat prometteur. » induisirent la révolution dans l’attente de l’Homme vis-à-vis de la Médecine, notée par Canguilhem lorsqu’il dit :
« L’activité du médecin... est devenue une exigence de l’homme qui refuse le mal. »

Progressivement, la vision de la Médecine changea.

En vérité, le progrès consistait à accueillir la Chirurgie en son sein. Ce n’était là que bon sens, puisqu’elle n’en était exclue que pour des raisons dogmatiques, rien à voir avec ses propres concepts. Qu’elle en devienne la figure de proue, après tout pourquoi pas ? Si l’on veut observer ce fait avec indulgence, on pourra se dire que c’était donner à l’Anatomie la première place qui lui revenait de droit. Ce n’est pourtant pas que cela qui s’est réalisé sous nos yeux. À la place, on assista à l’actualisation de deux faits apparemment contradictoires : de la pratique de la Chirurgie, on mit en avant l’illusion du résultat parfait (voir le sens pris par l’adjectif « chirurgical » dans le langage moderne de la Balistique), et quant à l’Anatomie, elle se trouva définitivement reléguée derrière la Physiologie, c’est là l’héritage de Claude Bernard (voir section B). Or, sur quelle connaissance s’appuie d’abord le chirurgien pour prétendre à la perfection ? Et que vient faire ici l’idée de perfection, alors qu’on parle de la vie ?

Le 3 décembre 1967, fut réalisée par le Dr Barnard la première greffe totale de coeur chez l’homme.

Je conserve fort le souvenir personnel des titres des journaux du lendemain. Leur grosseur ne fut peut-être égalée, un peu plus de dix-huit mois plus tard, que lorsque l’homme marcha sur la Lune. D’un coup, aux yeux du public le plus large, tout sembla pouvoir donc devoir être guéri. Pensez...même le coeur, si d’aventure celui-ci montrait de graves signes de faiblesse, pouvait être remplacé. Qu’était-ce là sinon le signe que la mort reculait pour de bon ?

Ce qu’on omet de dire ici, je le trouve résumé dans cet aphorisme cruel et non dénué d’humour carabin : « L’opération a réussi, malheureusement le malade n’a pas survécu ». (D’ailleurs Louis Washkansky n’a vécu que 18 jours avec la prothèse cardiaque posée par le Dr Chris Barnard)

Observons la réalité crue, en vétérinaires : ce que sait le chirurgien, travailleur manuel, c’est juste ce qu’il a fait. C’est beaucoup mais ce n’est pas tout, car ce que l’opéré, une fois refermé, en fera, n’appartient qu’à ce dernier.


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