Introduction
Les études se succèdent [1] et semblent nous dire que la fiabilité de notre toucher est assez nulle.
Les Méta études se succèdent et régulièrement mettent en évidence un résultat mitigé de l’ostéopathie sur telle ou telle pathologie.
Et je suis fermement convaincu qu’avec les mêmes paradigmes, la litanie ne va aller qu’en s’accentuant.
Alors si l’on s’en tient là, fermez le banc. Les mains et l’ostéopathie, c’est fini.
Et pourtant en France nous sommes maintenant plus de trente mille à se servir chaque semaine de nos mains pour faire des déductions qui se révèlent utiles pour nos patients qui en sont satisfaits au delà du simple hasard statistique.
Tenir compte des deux premiers paragraphes sans les mettre en doute reviendrait à penser que nous sommes deux groupes d’hallucinés :
– les soignants ostéopathes qui croient soigner
– et les patients qui pensent être soignés.
Effet placebo sur Gogo ! A noter que dans de nombreux cas les patients sont des animaux surement moins sensibles à l’effet placebo ... Quoi que, soyons fous !
Nos sens nous trompent ...
Bin, là non plus je ne vais plus passer des heures à essayer de démontrer le contraire, trop aléatoire. Et sur ce coup, je vais même donner raison à nos détracteurs ... Essayez à plusieurs ostéopathes de décrire ce que vous sentez au même endroit chez un patient et il ne faut pas être très perspicace pour se rendre compte qu’il y a un blême. Aucun ne dit exactement la même chose.
Pour ma part c’est une évidence, le toucher dépend de notre culture, de nos connaissances, de notre expérience, de ce sur quoi on porte attention, du fait que l’on se laisse aller à être synesthète (https://fr.wikipedia.org/wiki/Synes...) ou non ... bref un joli feu d’artifice de biais possibles qui nous éloignent d’autant plus d’un toucher carré, prétendument scientifique.
Deux attitudes possibles alors :
– 1 - Tenter de se rapprocher du graal de la neutralité. Pourtant je crois que c’est comme de vouloir rapprocher la courbe 1/X de zéro ... jamais on ne l’attendra, loin s’en faut.
– 2 - Accepter les défauts de son toucher, et apprendre à les connaître. C’est simple et plus on va dans ce sens et plus notre toucher et notre capacité à décrire ce que l’on ressent en touchant se développe et se fiabilise. C’est l’expérience. A mes yeux c’est pragmatique et la seule attitude possible. C’est l’attitude du sculpteur qui "sent" la pièce de bois qu’il a sous les mains et y voit la forme qu’il arrivera à faire naître. C’est de l’artisanat tactile et seul l’entraînement assidu et têtu fera un bon "toucheux".
Mais, comment à partir de quelque chose de faux pourrai t’on déduire des choses justes ?
Rares maintenant sont les gens qui en CE2 ont eu la chance de faire plein d’exercices où, au marché, on pesait des marchandises avec une balance romaine.
Elles avaient une particularité fondamentale pour un appareil de mesure, elles étaient toutes fausses ... Et pourtant, elles servaient tous les jours. Pour la simple raison qu’on pratiquait une double pesée. Une pesée du chou que l’on vendait qui donnait un chiffre faux .... Puis on faisait une deuxième pesée avec le chou accompagné d’un poids "étalon" dont la valeur était garantie par le bureau des poids et mesures ... La deuxième mesure était aussi fausse que la première. Mais la différence entre les deux mesures donnait le poids juste du chou en question.
Or, réfléchissons bien, nous faisons tous les jours la même chose avec nos mains. Nous testons, un tissu, une articulation. Le test est faux puisque nos sens sont facétieux. Puis nous plantons une action, une manipulation sur la zone qui nous occupe. Et nous retestons pour essayer de savoir ce qu’il s’est passé. Test, re-test, comme pesée, repesée. Et nous notons la différence entre avant et après et c’est elle qui nous dit que quelque chose s’est passé et c’est l’expérience clinique accumulée qui nous rassure quant au bienfondé de cette "différence" dans la qualité des tissus avant et après.
C’est en forgeant qu’on devient forgeron, et avec cette idée en tête, c’est en touchant qu’on devient un bon toucheux. Tout simplement. Et même avec nos erreurs, défauts, finalement, nous le savons, nous sommes capables d’appréhender l’état d’un tissu dans son bon ou son mauvais fonctionnement. Juste une histoire de tenségrité.
Pas très efficace ...
De même, le pouvoir discriminatoire du toucher dans les études est censé être très moyen, aussi comment voulez vous que ceux qui ne touchent pas comprennent ce que nous ressentons au fil des consultations ?
Mais il faut bien savoir ce que désigne le terme de toucher pour chacun. Si le toucher est le toucher épicritique [2], alors, je le concède il ne vaut pas grand chose à vrai dire. Si le toucher est un toucher haptique, considéré comme plus grossier, finalement j’aurai tendance à le penser supérieur au premier en fait. S’il se sert du toucher proprioceptif pour appréhender le proprioceptif du patient, il est encore meilleur.
Mais à la fin il manquera toujours quelque chose pour comprendre nos expériences cliniques. Par exemple poser la main sur le thorax d’un patient et brutalement voir une image de pierres qui tombent. La patient vous raconte alors que quelques années auparavant une maison lui est tombé sur le corps ... Ceci (et combien d’expériences similaires) n’est pas écrit dans un cours de toucher avec des récepteurs fussent’ils sensibles.
Non, pour comprendre cela, il vaut mieux admettre qu’un champ vital contient notre matière, qu’il est capable de modeler le corps physique, lui est attaché, mais a une certaine indépendance et surtout contient des informations que notre propre champ vital peut apprendre à lire. Ce sont par exemple les travaux de Ruppert Sheldrake [3] sur ce qu’il appelle le champ morphique qui nous donnent une compréhension du phénomène. Ce sont aussi les travaux de Bernard Dubreuil [4] sur les membres fantômes avec ce qu’il appelle le champ de présence.
Et, pour vraiment comprendre le toucher ostéopathique, il convient de penser qu’au delà de notre main, c’est le champ vital, (de conscience, de présence, morphique) de ma main qui perçoit non pas seulement le corps physique du patient mais son champ vital (de conscience ...). Et alors, le toucher est d’abord un dialogue entre deux champs qui échangent des informations. A partir de là, beaucoup de nos expériences deviennent compréhensibles et surtout cet échange, nous le constatons cliniquement, est porteur de modifications corporelles, donc possiblement soignant. Mais, bon, il faut changer de paradigme sur la vision médicale consensuelle du corps, de la vie. Très difficile dans ces temps farouches, mais pourtant si évident quand on y pense.
Conclusion ...
Admettons que par le jeu des différences et avec l’expérience, nous arrivions de mieux en mieux et à soigner et à fidéliser nos sensations pour qu’elles nous trompent moins ou tout du moins qu’on apprenne avec l’expérience à cartographier le rapport entre le vrai du patient et notre faux sensitif.
Bon, admettons qu’il existe un champ qui contient toutes les informations du corps et avec lequel notre champ de thérapeute discute, ce qui nous ouvre la porte à un toucher plus perspicace, plus efficace. Alors de nombreuses sensations synesthésiques, de nombreuses histoires de notre toucher retrouvent une épaisseur sur laquelle on peut s’appuyer.
Mais allons plus loin ... Tout champ a la particularité d’aller à l’infini avec une sensibilité qui décroit avec la distance. Et pourquoi, alors, le champ de conscience du futur patient en quête de soins n’aurait pas une petite sonnette qui lui dirait parmi tous les champs vitaux des nombreux thérapeutes présents autour de lui lequel est celui qui lui conviendra le mieux à ce moment là ? Et donc parmi tous les ostéopathes que nous sommes, il choisira assez souvent, plus souvent qu’avec le hasard, celui dont le champ vital saura pousser le sien plus loin encore vers la guérison.
Dans ce cas, on comprendrait bien pourquoi les expériences en double aveugle avec un thérapeute qui fait vraiment ou bien fait semblant de vous traiter en ostéopathie, mais en tous cas que vous n’avez pas choisi ne peuvent pas aboutir. Car l’efficacité, ne dépend pas de la technique, mais de la capacité du champ de conscience du thérapeute à transformer son patient dont le champ de vital doit être en adéquation [5]
Aussi, en acceptant ce principe, à la fois, oui nous serions beaucoup plus efficaces avec la patient qui passe la porte de notre consultation que ce qu’en disent les études, c’est une évidence, mais tout de suite nous saurions aussi que le résultat ne dépend pas vraiment de nous, de notre technique, de notre sagacité, de nos connaissances ... Mais simplement de l’opiniâtreté à devenir un ... guérisseur, dont le champ de vital connait bien son boulot à la fin. De quoi rabattre un peu notre égo de soignant.
Petits éléments de réflexions, à vous d’en faire ce que bon vous semble ...