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Compte rendu : Table ronde - La place du Still Point dans une consultation d’ostéopathie

Créé le : dimanche 5 février 2023 par Michel Chêne, Philippe Prat

Dernière modificaton le : dimanche 5 février 2023

 Il s’agit là du compte rendu du débat autour du thème ostéopathie humaine et communication interdisciplinaire. Il s’agit d’idées échangées, de propositions et de contradictions rencontrées... n’hésitez pas à donner vos avis sur ces sujets et sur les propositions... Nous avons volontairement décidé de ne pas nommer les auteurs et autrices des citations, en effet les tables rondes ont pour but de faire réfléchir en groupe, et non individuellement.

Il s’agit la plupart du temps d’un langage oral non-modifié ou peu modifié, pour garder l’essence de ce qu’a voulu transmettre la personne. Cela peut expliquer certaines redites ou certaines tournures de phrase...


  L’Ostéo4pattes-SDO existe depuis bientôt 20 ans. Notre objectif est de communiquer autour de l’ostéopathie humaine et animale ainsi que de créer des liens autour de la santé et du monde ostéopathique. Ces réunions sont organisées autour de problématiques que rencontrent les ostéopathes et pour échanger autour de ces problématiques.


Introduction


 « Il nous donna ensuite les instructions détaillées quant à la manière d’acquérir des doigts qui pensent, sentent, voient, savent, capables de guider cette Marée vers son still-point, son temps de pause, afin de contrôler son fonctionnement dans la physiologie du corps. » 

R. Becker, La vie en mouvement, p. 57

  Afin d’introduire le sujet, nous avons réaliser une petite étude des représentations sociale, sur une dizaine d’ostéopathe, avec une seule consigne, répondre a la question suivante en 1 ou 2 lignes.

Qu’est-ce qu’un Still-point pour vous ?

  Vous trouverez ci-dessous les réponses ainsi que leurs analyse avec un système de regroupement de mots.

 Finalement regroupées sous forme de "sous-thème" :

  • Immobilité (15) : arrêt (5), équilibre (2), mise en tension (1), apaisement (1), Barrière (1), immobilité(1), tension (1), calme (1), ralentissent (1), maintenir (1)
  • Traitement / action (12) : réinitialisation (3), reprise (3), normalisation (2), correction d’une ou plusieurs dysfonctions (1), chercher (1), mise au neutre (1), relâcher (1)
  • Mouvement (10) : MRP (3), mouvement (2), tempête anarchique (1), roulis (1), passage (1), autour (1), mouvement spontané (1)
  • Perception (6) : moment (3), Sensation (1), phase d’entre deux (1), Point de tension (1)
  • Temporalité (1) : quelques secondes à plusieurs minutes (1)
  • Autre : pathologique (2), concept

 Dans cette petite étude des représentations sociales de 10 personnes étudiantes, ostéopathes humains et animaliers qui n’est pas du tout exhaustive, on pourrait dire que le still-point est : « Un moment tendant vers l’immobilité qui est un équilibre entre 2 phases de mobilités différentes allant vers une réinitialisation dans un but correctif ».


Historique, définitions, concept associé


Sutherland

  Le concept de Still-point est liée à la fluctuation du liquide cérébrospinal activée par les temporaux [1]. Ray G Hulburt, DO, rédacteur en chef du journal de l’AOA explicite la pensée du livre de Sutherland, en prenant l’image d’un point d’appui d’une balance ; un point de pivot. Ce still-point est un fulcrum, un point d’équilibre autour duquel les forces s’équilibrent et le système se réorganise [2].

R. Becker

 « C’est un moment d’équilibre physiologique ; un phénomène anatomo-physiologique effectué par le corps. Qui peut se produire, à n’importe quel moment, n’importe où, de quelque façon que ce soit. » [3]

Pierre Tricot [4]

 Au fur et à mesure du temps, dans la littérature crânienne, tout arrêt d’un mouvement, décrivant les processus alternatifs au sein du système corporel, est devenu un still-point. Ceci modifie le concept de base, car on ne se préoccupe plus de l’état des tissus (détendus et au calme) alors c’est bien still-point, ou simplement arrêtés au cours d’un processus de mouvement libérateur, auquel cas, ce n’est pas détendu et calme donc pas "still".
  Selon le modèle de l’approche tissulaire, tout mouvement tissulaire spontané qui n’est pas le mouvement physiologique (expansion/rétraction ou rotation externe/rotation interne) indique une mobilisation d’énergie qui se libère dans et par le mouvement.
  Dans ce cas de libération/mouvement, nous reconnaissons 2 types d’arrêts : l’arrêt en still-point et l’arrêt en contrainte.

L’arrêt en still-point se produit lorsque la libération énergétique est terminée (résolution).
  Alors, les tissus reviennent naturellement dans leur position neutre et s’arrêtent.
  Ce calme et cette immobilité suggèrent effectivement un état de "stillness".

L’arrêt en contrainte se produit lorsque dans un déroulement tissulaire, signant donc une libération énergétique, les tissus s’arrêtent, mais ne sont pas dans leur position neutre et pas au repos.
  On sent alors que le mouvement est arrêté, mais que la libération n’est pas terminée.
  Pour faire repartir la libération, il faut le plus souvent augmenter les paramètres de densité/tension, ce qui va faire repartir la libération jusqu’à sa fin qui sera alors au neutre et en "stillness".

  Still-point, malgré son nom indique un moment, une étape dans un processus, le retour des tissus à un moment d’immobilité et de tranquillité.
  Ce moment d’immobilité et de tranquillité est un état de stillness.

Patrick Chêne [5]

  Si on part du principe que le corps est un système qui a la propriété de tenségrité. Alors il possède une fréquence de résonance, c’est-à-dire une fréquence pour laquelle il ne peut dissiper l’énergie apportée par chaque cycle de la dite fréquence. L’oscillation du corps s’amplifie et alors devient perceptible par nos mains. De même cette fréquence alors, par définition possède des harmoniques. Le MRP n’est pas dans ce cas un mouvement autonome mais une résonance que l’on provoque. Et on peut le provoquer sur la fréquence de base ou bien sur une de ses harmoniques. Quand on teste le MRP (à la vitesse de 8 à 12/ minute selon Sutherland) et qu’on se met en résonance avec, on peut ainsi faire diminuer la fréquence. En indusant cette résonance, on peut décider de s’enfoncer de plus en plus dans la lenteur. Le patient (et le thérapeute) entre dans un équilibre neurovégétatif plutôt parasympathique jusqu’à un temps d’arrêt de la résonance, qui n’est ni plus ni moins que le Still point. [6]

  Corollaire : si on se permet de ralentir le MRP, sachant que ce n’est qu’une résonance, et qu’on peut descendre des harmoniques, on peut aussi les monter ; En accélérant la fréquence, on retrouve une harmonique supérieure à un certain seuil, la fréquence se stabilise. On a une harmonique qui ne serait pas de 8, mais de 16 par exemple. On passe alors dans un état orthosympathique plus prononcé et on peut aller comme ça d’harmoniques en harmoniques. À l’inverse du still-point, elles conduisent à une autre singularité que l’on appellera le still-bang qui est un autre moyen d’arrêter le corps.


Le still-point et sa place dans la prise en charge ostéopathique ?


A) Un moment qui s’installe

  Le still-point « je ne le fais pas. Il arrive. Je l’observe, il est là ». C’est un moment de transmutation où les choses vont changer.

 Référence au livre Stillness [7] qui retrace les bases de la biodynamique. « Un still-point se présente naturellement sans suggestion et se trouve défini en biodynamique comme le moment où dans le neutre du patient l’immobilité locale se propage dans tout le corps et après lequel apparait la respiration primaire. C’est par l’entreprise de ce still-point, du corps conscience, que les parties se relient au tout avec cohérence. Un still-point crée le libre espace nécessaire à un échange dynamique entre les forces cohérentes du mouvement de santé et les forces déprimées du mouvement inertiel. La respiration primaire émerge du still-point. »

  « Le point immobile still-point n’est pas à proprement dit un point, il s’agit d’un état d’immobilité dans le patient où se manifeste dans l’espace et dans le temps, de façon biocinétique et biodynamique, dans le champ bioélectromagnétique en présence, les phénomènes d’autocorrection, d’autorégulation et d’autoguérison. » René Briend

  Ces principes sont les mêmes que ceux développés par Becker. Dans ces pratiques-là, il y a peu de mobilisation. Un ostéopathe se dit incapable de ressentir un still-point s’il bouge en même temps. Il faut que je sois au neutre pour l’apercevoir. Je laisse travailler le corps au cours de mes appuis après être allé sur la partie du corps en fonction de mon diagnostic. Becker allait lui directement sur le corps pour faire son diagnostic On suit les tissus jusqu’à un point d’immobilité, expansion et retour au mouvement.

  Pour une autre ostéopathe, c’est un moyen de flottement et une façon de réinformer le système.

  On se perd dans le temps avec le still-point.

  Peut-on arriver à un still-point avec chaque patient ? On ne le cherche pas. Ce n’est pas le but. Le but c’est le chemin.

B) Un moment que je provoque :

  Utilisation en termes de technique avec l’idée de « provoquer » un Still-point pour rentrer en parasympathicotonie et still-bang pour rentrer en orthosympathicotonie.

  Au moment où l’on est sur un still-point, on s’arrête, on est hors du temps qu’on connait et l’espace s’agrandit ; se dilue. On passe d’un univers à l’autre. C’est une singularité que les corps vivants utilisent pour s’arrêter et passer à autre chose. Avec nos soins habituels, on y arrive de temps en temps.

  Avec la résonance c’est une façon différente d’y aller, encore plus fréquemment ; avec le corps en général, ou localement sur une zone. Reste à déterminer quand est-ce que c’est intéressant soit de laisser le corps y aller tout seul ou soit de l’accompagner. Exemple de l’entorse de la cheville où on commence par un still-point et on termine par un still-bang en obtenant une diminution de la douleur.

  Différence philosophique entre biodynamie et cette action proposée. En biodynamie on interfère le moins possible, on cherche un point d’appui et on laisse le corps se débrouiller. Dans cette conception, « plus on veut être neutre, plus c’est compliqué de l’être ». « En étant actif, on peut être autant neutre qu’en étant inactif ». Une fois qu’on a décidé de rentrer dans un concept différent du MRP, où le MRP c’est juste la fréquence de résonance d’un système physique, alors de manière active, je mets cette résonance en route et j’accompagne mon patient vers plus de résonance et ceci me permet de lire plus facilement la résonance puisque je ne suis pas en train d’attendre quelque chose d’extérieur.

  Pour atteindre le still-bang je cherche une harmonique de plus en plus rapide. Je propose et j’accompagne le corps sur une vibration de plus en plus rapide. La structure réagit en tenségrité avec sa fréquence de résonance. On met notre corps en vibration à cette fréquence de résonance, qui a physiquement des harmoniques. Il n’y a pas qu’une seule fréquence possible. Sutherland nous a donné sa version du MRP qui est une des fréquences de résonance du corps. Sur un occiput, ou un iliaque bien coincé il m’arrive de faire un still-point et un still-bang et ça se libère tout de suite. Je les fais tout le temps ensemble.

  Il n’y a pas d’études scientifiques sur le still-point ou still-bang. Il faut se rattacher à la tenségrité qui a été prouvée par ailleurs, utiliser la résonance avec nos mains et voir comment on pourra prouver ce qu’est un still-point sur le plan physique.

  Un autre ostéopathe utilise le still-point dans le but d’apaisement pour les soins dentaires apportés aux chevaux.

C) Un moment où ma conscience est modifiée :

  C’est le chemin pour arriver au still-point qui est important et quand on arrive, que le still-point est là, c’est comme si le patient se retrouvait (dans son inconscient) face à tous ses problèmes et choisissait de repartir dans la direction qui lui convient. C’est donc la confrontation avec l’émergence de tout ça dont il n’a pas forcément conscience, et dont il peut prendre conscience après la consultation.

  L’émergence se réalise selon un vécu personnel. Des fois c’est intentionnel dans la pratique. Le fait de mettre son intention, on est présent à une réponse qui émerge par rapport à cette intention ; on a l’émergence d’un ressenti qui peut être conscient, où on était dans l’intention de provoquer quelque chose, ou d’autres fois on a l’impression que les choses nous échappent, cela nous envahit, nous submerge ainsi que le patient. Dans ces situations même si l’intention est présente, on n’a pas le contrôle, par contre il faut maintenir un type de stimuli, d’oscillations.

  La définition du still-point donnée par Sutherland et Becker est, avant tout, une expérience personnelle. Ce qui ressort dans les propos de chacun.


Le still-point est-il nécessaire dans une consultation d’ostéopathie ?


  Cela fait partie de nos concepts, mais ce n’est pas indispensable

  Le still-point se fait qu’on en ait conscience ou pas. Il est possible de ne pas le percevoir, mais qu’il intervienne quand même, sinon, selon un ostéopathe, il n’y aurait pas de changement. En fait, pour lui c’est le moment où ça transmute et ça change ; c’est la définition même du still-point.

  Pour un autre ostéopathe, c’est inutile à chaque séance. C’est possible aussi que l’on crée les conditions pour que le still-point se passe plus tard, en dehors du traitement. La vraie question, selon lui, c’est : « Est-ce que le still-point et le still-bang à l’autre bout sont les seuls moyens pour arriver à une transmutation, une guérison ? N’y a-t-il pas d’autres moyens d’y arriver ? »

  Pour une autre ostéopathe, le still-point n’est pas utilisé comme un outil. Dans la consultation, il se peut qu’on y arrive. C’est un moment hors du temps et de l’espace. « Je laisse faire ». « J’ai l’impression que ce n’est pas une technique humanisable, c’est quelque chose d’autre ».

  Une des façons de répondre à cette question sur la nécessité du still-point serait peut-être de déterminer quel est le but d’une consultation d’ostéopathie ? Qu’est ce que les gens viennent chercher, dans cette rencontre, quand ils viennent consulter en ostéopathie.

[1Sutherland W.G., Teachings in the Science of Osteopathy, Rudra Press, 1990 ; 336p.

[2Sutherland W.G., Teachings in the Science of Osteopathy, Rudra Press, 1990 ; p. 16.

[3Becker R.E., La vie en mouvement, Sully, Vannes, 2012 ; 463p.

[4Tricot P, Approche tissulaire de l’ostéopathie Sully, 2002 ; p.308

[5Chêne P. Amelie G. Le Corps Tenségritif, Sully, Vannes, 2022 ; 258p. Disponible ici : https://www.revue.sdo.osteo4pattes.eu/spip.php?article2441

[6Pour aller plus loin lire l’article : Le MRP harmonique (résumé) article entier pour les abonné.e.s de l’O4PSDO : Le MRP Harmonique



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