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Conseil d’État, 5e chambre - n°452905

Inédit au recueil Lebon - 15 avril 2022
 
Créé le : mardi 5 juillet 2022 par Jean Louis Boutin

Dernière modificaton le : mardi 5 juillet 2022

Conseil d’État 5e chambre - N° 452905

Association Française de Chiropraxie (AFC)


N° 452905
S:2022:452905.20220415
Inédit au recueil Lebon
Texte intégral
Lien : CE, Lecture du vendredi 15 avril 2022


 Lecture du vendredi 15 avril 2022

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


Rapporteur : Mme Flavie Le Tallec
Rapporteur public : M. Florian Roussel
Avocat(s) : SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 25 mai 2021 et le 11 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d’État, l’association française de chiropraxie a demandé au Conseil d’État :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision implicite du 3 avril 2021 par laquelle le Premier ministre a refusé de prendre le décret d’application de l’article 75 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, afin de définir les conditions dans lesquelles les personnes faisant un usage professionnel du titre de chiropracteur sont soumises à l’obligation de formation continue ;
2°) d’enjoindre au Premier ministre de prendre ce décret sans délai, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l’État la somme de 3 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002, notamment son article 75 ;
- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Flavie Le Tallec, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de l’association française de chiropraxie.

Considérant ce qui suit :

1. Par une lettre reçue le 2 février 2021, l’association française de chiropraxie (AFC) a demandé au Premier ministre de prendre les mesures nécessaires à la mise en œuvre, pour les personnes faisant un usage professionnel du titre de chiropracteur uniquement, du cinquième alinéa de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Elle demande l’annulation pour excès de pouvoir du refus implicite qui lui a été opposé, résultant du silence gardé pendant plus de deux mois sur sa demande.

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

2. En vertu de l’article 21 de la Constitution, le Premier ministre " assure l’exécution des lois " et " exerce le pouvoir réglementaire " sous réserve de la compétence conférée au Président de la République pour les décrets en Conseil des ministres par l’article 13 de la Constitution. L’exercice du pouvoir réglementaire comporte non seulement le droit mais aussi l’obligation de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu’implique nécessairement l’application de la loi, hors le cas où le respect d’engagements internationaux de la France y ferait obstacle.

3. Aux termes du cinquième alinéa de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 : " Toute personne faisant un usage professionnel du titre d’ostéopathe ou de chiropracteur est soumise à une obligation de formation continue, dans des conditions définies par décret. (...) ".

4. Les dispositions citées au point précédent ne laissent pas à la libre appréciation du Premier ministre l’édiction du décret dont elles prévoient l’intervention. L’application de ces dispositions est impossible en l’absence du décret définissant les conditions dans lesquelles le chiropracteur doit satisfaire à cette obligation de formation continue, notamment s’agissant de la fréquence, des modalités et du contenu de cette formation. La circonstance que les médecins, sages-femmes, masseurs-kinésithérapeutes et infirmiers autorisés à utiliser le titre de chiropracteur, seraient soumis, au titre de la profession qu’ils exercent, à une obligation de formation continue, est sans incidence dès lors que l’obligation de formation continue prévue par les dispositions mentionnées au point 3 est spécifiquement attachée à l’usage du titre de chiropracteur. En dépit des difficultés éventuellement rencontrées par l’administration dans l’élaboration de ce texte, la décision de refus attaquée méconnaît l’obligation de prendre dans un délai raisonnable le décret d’application de l’alinéa 5 de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002, en tant qu’il est relatif à la profession de chiropracteur. Dans ces conditions, l’association requérante est fondée à demander l’annulation de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a refusé d’édicter ce décret d’application.

Sur les conclusions tendant à la prescription des mesures d’exécution et au prononcé d’une astreinte :

5. Aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution. / La juridiction peut également prescrire d’office cette mesure ". Aux termes de l’article L. 911-3 du même code : " La juridiction peut assortir, dans la même décision, l’injonction prescrite (...) d’une astreinte (...) dont elle fixe la date d’effet ".

6. L’annulation de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a refusé de prendre le décret d’application du cinquième alinéa de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 en tant qu’il est relatif à la profession de chiropracteur, implique nécessairement l’édiction de ce décret. Il y a lieu pour le Conseil d’État d’enjoindre au Premier ministre d’édicter ce décret dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision et, dans les circonstances de l’espèce, de prononcer à l’encontre de l’État, à défaut pour le Premier ministre de justifier de l’édiction de ce décret dans le délai prescrit, une astreinte de 500 euros par jour de retard jusqu’à la date à laquelle la présente décision aura reçu exécution.

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’État, le versement à l’association française de chiropraxie de la somme de 3 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La décision implicite par laquelle le Premier ministre a refusé de prendre le décret d’application du cinquième alinéa de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 en tant qu’il est relatif à la profession de chiropracteur est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au Premier ministre de prendre le décret d’application du cinquième alinéa de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 en tant qu’il est relatif à la profession de chiropracteur dans un délai de six mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : Une astreinte de 500 euros par jour est prononcée à l’encontre de l’État s’il n’est pas justifié de l’exécution de la présente décision dans le délai mentionné à l’article 2 ci-dessus. Le Premier ministre communiquera au secrétariat du contentieux du Conseil d’État copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter la présente décision.

Article 4 : L’État versera la somme de 3 500 euros à l’association française de chiropraxie au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à l’association française de chiropraxie, au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée à la section du rapport et des études.

Délibéré à l’issue de la séance du 24 mars 2022 où siégeaient : M. Olivier Yeznikian, assesseur, présidant ; M. Jean-Philippe Mochon, conseiller d’État et Mme Flavie Le Tallec, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 15 avril 2022.

Le président : Signé : M. Olivier Yeznikian
La rapporteure : Signé : Mme Flavie Le Tallec
Le secrétaire : Signé : M. A... B...

ECLI:FR:CECHS:2022:452905.20220415


 Commentaires


Il semble que la formation continue des ostéopathes soit toujours oubliée !

Le 1er juillet 2022, le conseil d’administration du SFDO a publié un article sur son site : Le Conseil d’État rend un arrêt important en matière de formation continue (FC).

Cet article appelle un certain nombre de remarques

- Où est la requête du SFDO (voire des autres associations socio-professionnelles [ASP] des ostéopathes exclusifs) auprès du Conseil d’État pour obliger la Première ministre à prendre le décret d’application du cinquième alinéa de l’article 75 de la loi du 4 mars 2002 en tant qu’il est relatif à la profession d’ostéopathe. À ce jour, seule l’AFC (Association Française de Chiropraxie) a déposé une requête et a obtenu cette décision du CE (voir ci-dessus).

- Le SFDO se félicite de travailler avec l’AFC sur ce sujet. Or, selon nos informations, s’il y a bien eu une réunion récemment entre les deux ASP, elle n’a débouché pour le moment sur rien de vraiment concret, ce qui semble évident puisque les recommandations en matière de FC des uns et des autres ne peuvent pas être communes au vu des actes effectués par les deux professions.

- L’obligation de formation continue inscrite dans larticle 4 du décret n° 2007-435 du 25 mars 2007 est jusqu’à présent restée lettre morte. Si l’AFC est enfin arrivée à obliger le gouvernement à décider sous 6 mois, et sous astreinte au-delà de 500 euros par jour de retard, rien pour les ostéopathes. On suppose que les ASP vont se servir de la lecture du CE pour essayer de faire bouger les choses. Les ostéopathes peuvent dire MERCI à l’AFC pour cela.

Il reste de connaître les conditions de cette obligation :

Quel organisme sera en charge de celle-ci, de son contrôle et des éventuelles sanctions en cas de manquement ? Rappelons la nécessité de cette formation continue puisque la sécurité des patients est en cause .

Quelles seront les thèmes retenus ? Il existe actuellement en ostéopathie un grand nombre de formations dites post-graduées, et il est d’une nécessité absolue que l’ensemble de ces "post-graduates" soit évalué et validé par un organisme qui soit totalement indépendant de celles-ci, comme des écoles de formation (qui ont également des post-gradués) et peut-être des ASP qui ont elles aussi, chacune, un organisme de formation.

Et la formation continue des enseignants ostéopathes ? [1]

Il existe une autre formation continue qui devrait être obligatoire, c’est celle des enseignants ostéopathes dans les établissements de formation.
Selon les décrets de 2014 (sauf erreur de notre part), les établissements avaient obligation de fournir les attestations, les fiches de présence, et tous les documents nécessaires pour valider les 30 heures annuelles obligatoires, dont 15 heures en stage de pratique.
Cette procédure était nécessaire pour assurer une trace de formation des formateurs en charge de cours dans un établissement agréé. 

Espérons que le gouvernement et les ASP représentatives s’entendent pour la sécurité des patients et la reconnaissance de notre profession.

Jean-Louis Boutin

[1] On entend par formation pour les enseignants, un enseignement ostéopathique et pas obligatoirement un enseignement en science de l’Education (toujours d’après les décrets de 2014, seul le Directeur d’établissement doit posséder un Master en Management ou un Master en science 2 de l’éducation).



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