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JIM : Un torticolis pas si banal… L’avis d’un ostéopathe

Pierre Renaudeau
 
Créé le : lundi 2 décembre 2019 par Pierre Renaudeau

Dernière modificaton le : lundi 2 décembre 2019

 Un torticolis pas si banal… L’avis d’un ostéopathe

Sur la Lettre du Journal International de Médecine publiée le 6 septembre 2012, dans le cadre de la Pédiatrie Pratique, Formation Médicale Continue, paraissait un article intitulé : Un torticolis pas si banal, article repris sur le Site de l’Ostéopathie avec l’autorisation du J.I.M.

Cet article relate le cas d’une fillette victime d’une chute avec tout de même un hématome au pavillon de l’oreille, suivie d’un torticolis, soignée par un ostéopathe (en douceur) sans succès puis hospitalisée à J-14 devant la persistance des signes.

L’article relate la recherche diagnostique qui se conclue sur une spondylodiscite cervicale atlo-axoïdienne, sans avoir retrouvé le moindre germe, et avec l’appui d’un cliché de son IRM cervicale que l’on peut visualiser ci-dessous, puis agrandie.

Si l’on reprend les lignes géométriques identifiables sur cette IRM, il apparait que :

Lignes par calque de l’IRM de la fillette de trois ans.

Références d’après W Kahle, H Leonhardt et W Platzer : une « coupe médio-sagittale dans la région des articulations de la tête avec la colonne vertébrale , page 61, schéma E de Anatomie Tome 1 édition Flammarion Médecine-sciences 2° édition, 9° tirage 1991.

On peut déjà en conclure que ce cliché d’IRM comporte quelques anomalies non négligeables de géométrie méritant une analyse plus poussée.

En premier l’angle entre l’odontoïde et l’ensemble de la deuxième cervicale est particulièrement inquiétant et attire tout de suite l’œil. Ci-dessus il est mesurable à 109°, alors que d’après Kahle, H Leonhardt et W Platzer, Anatomie Tome 1 édition Flammarion Médecine-sciences 2° édition, 9° tirage 1991, page 38, l’odontoïde est verticale avec l’ensemble pédicules-lames-épineuse de l’axis horizontal, soit un angle de 90°. 

Cette première anomalie de l’IRM ne peut signifier qu’une fracture de la base de l’odontoïde.

- Si l’on se réfère au tracé des repères osseux du canal rachidien, on a la surprise de constater que chez la fillette, le canal rachidien est soumis à un effet de coupe-cigare en regard de l’atlas :

On peut constater que le positionnement antéro-postérieur de l’atlas, s’il est satisfaisant par rapport à l’occiput et au sphénoïde, il est anormalement antérieur par rapport à l’axis mais surtout par rapport à la troisième cervicale, chez la fillette. Ceci signifie une luxation antérieure de l’atlas sur l’axis, ce qui est fréquent en association avec les fractures déplacées de l’odontoïde. Il faut pour cela une rupture des ligaments atlo-axoïdiens postérieurs.

Enfin, si l’on prend le temps de mesurer les diamètres antéro-postérieurs de ce canal rachidien :

Il est clair que la luxation de l’atlas sur l’axis réduit le canal rachidien en regard de l’atlas.

Pour lever les derniers doutes mettons en regard l’IRM et un cliché de profil normal issu de Anatomie clinique de Pierre Kamina page 143, édition Maloine, 3° édition 2009 :

En conclusion, on peut penser au vu de cette IRM à une spondylodiscite, mais vraisemblablement secondaire à une fracture de l’odontoïde associée à une luxation antérieure de l’atlas sur l’axis non diagnostiquée et non traitée. Il eût fallu pratiquer un laçage postérieure de l’atlas sur l’axis pour stabiliser et réduire la fracture de l’odontoïde (technique de Judée), évitant ainsi à cette fillette de repartir avec un rétrécissement du canal rachidien cervical haut, source peut-être, plus tard, de troubles neurovégétatifs inexpliqués (en sport par exemple, évanouissements après flexion cervicale (roulade, rugby…)) ou des migraines. Notons encore que l’avancée de l’atlas vient pousser sur la muqueuse pharyngée qui est juste devant et peut expliquer l’irritation de cette région (sans germe retrouvés, rappelons-le). L’appui de la partie postérieure de l’atlas sur la moelle allongée peut également être à l’origine de la température à la hausse inexpliquée (centres neuro-végétatifs).

Il y a fort à parier, par ailleurs, que c’est le collier cervical qui a « sauvé les meubles » en immobilisant la région, ce type de fracture commençant à consolider, chez un enfant de cet âge, à 21 jours, le corps médical attribuant, lui, l’amélioration au traitement antibiotique, sacrifiant la logique à l’inébranlable foi dans le microbe, bien qu’on n’en ait retrouvé aucun.

Par ailleurs ce cas confirme le point de vue selon lequel il ne faut jamais manipuler un rachis chez un sujet qui a chuté, avec hématome de surcroît, avant le délai de sécurité de trois semaines (21 jours). Notre ostéopathe, même avec des manipulations douces, a pris le risque sur une telle fracture de déclencher un hématome, potentiellement compressif de la moelle cervicale (tétraplégie, etc.).

Bien sûr, des informations complémentaires seraient nécessaires pour confirmer ce diagnostic de fracture luxation, entre autres l’intégralité de l’IRM.

Pierre RENAUDEAU Ostéopathe

 JIM : Un torticolis pas si banal…

 La Lettre du JIM/FMC - Copyright © Len médical, Pédiatrie pratique, décembre 2008 - Publié le 06/09/2012

Bien que ce cas soit un cas un peu extrême dont le traitement ne concerne pas les ostéopathes, le fait d’avoir été vu et traité par un ostéopathe " dont les manipulations cervicales, douces, s’avèrent inefficaces" doit nous interroger sur notre propre démarche. Il est bon de savoir qu’une spondylodiscite peut éventuellement être un diagnostic possible...

Le Site de l’Ostéopathie remercie le Journal International de Médecine (JIM) de l’avoir autorisé à reproduire cet article

 Marion, fillette de 3 ans, sans antécédent, est amenée par sa mère aux urgences pédiatriques pour un torticolis évoluant depuis 15 jours.

Histoire clinique

Le torticolis a débuté un soir au retour de chez sa nourrice où elle aurait fait une chute (la maman avait remarqué ce soir-là une pâleur inhabituelle de l’enfant et un hématome du pavillon de l’oreille gauche). Deux jours plus tard, devant la posture inhabituelle de son enfant, elle consulte son médecin traitant qui diagnostique une pharyngo-laryngite et prescrit une corticothérapie par bétaméthasone pendant 3 jours. Devant la persistance du torticolis au bout de 8 jours, elle consulte un ostéopathe dont les manipulations cervicales, douces, s’avèrent inefficaces. C’est dans ce contexte que nous recevons la fillette aux urgences pédiatriques au bout de 2 semaines d’évolution du torticolis.

Examen clinique

À l’examen général, Marion est fébrile à 38,5 °C, mais elle n’a présenté ni frisson, ni cyanose, ni marbrure. C’est d’ailleurs la première fois que la fièvre est objectivée : elle n’a pas été prise pendant ces 15 derniers jours. L’enfant présente un torticolis gauche réductible et une pâleur cutanée. L’examen ORL retrouve une angine érythémato-pultacée bilatérale, les tympans étant normaux, les aires ganglionnaires cervicales libres. L’examen neurologique est normal. En particulier, on ne retrouve pas de syndrome cérébelleux ni de signe d’hypertension intracrânienne. La palpation des épineuses cervicales n’est pas douloureuse et on retrouve une contraction exagéré du sterno-cleïdo-mastoïdien gauche. Le reste de l’examen clinique est sans particularité.

Figure 1. - Clichés cervicaux de face (a) et de profil (b). On ne note pas de ruptures de courbure du rachis cervical ni d’épaississement des parties molles.

Figure 1. - Clichés cervicaux de face (a) et de profil (b).
On ne note pas de ruptures de courbure du rachis cervical ni d’épaississement des parties molles.

Examens complémentaires initiaux

Les clichés cervicaux (figure 1), réalisés devant la notion initiale de traumatisme, sont normaux. Le bilan biologique montre un syndrome inflammatoire (encadré).

Quel diagnostic portez-vous ?


Discussion diagnostique

À ce stade, le diagnostic reste incertain entre une suppuration ORL méconnue, une spondylodiscite ou un traumatisme cervical coexistant fortuitement avec une angine.

 Après prélèvements bactériologiques (sang, urine, gorge), un traitement antibiotique parentéral par ceftriaxone + métronidazole est instauré, dans l’hypothèse d’une infection ORL compliquée. L’examen par le médecin ORL, les clichés radiologiques et l’échographie cervicale effectuée par un radiopédiatre ne montrent pas de signe en faveur d’une suppuration ORL. L’antibiothérapie est modifiée : ceftriaxone + vancomycine à visée antistaphylococcique. Un collier cervical semi-rigide est mis en place.

 La scintigraphie osseuse montre une hyperfixation tardive se projetant au niveau des vertèbres cervicales C1 – C2 (figure 2), mais ne permet pas de trancher entre l’hypothèse traumatique et la spondylodiscite. C’est l’IRM cervicale qui apporte le diagnostic de certitude (figure 3), confirmant un aspect de spondylodiscite cervicale C1–C2, sans épidurite ni signe d’atteinte médullaire.

Figure 2. Scintigraphie cervicale :
clichés tardifs d’incidence antérieure et postérieure montrant une hyperfixation non spécifique se projetant en regard de l’espace axo-atloïdien.

Figure 3. IRM cervical en coupe sagittale T1 avec injection (a) et en T2 avec agrandissement (b). On note un hyposignal de l’odontoïde en T1 avec rehaussement périphérique lié à l’injection de gadolinium ainsi qu’un léger hyper signal T2.

Évolution

L’apyrexie est rapidement obtenue au bout de 48 heures, les douleurs cervicales diminuent et le torticolis régresse au bout de quelques jours permettant à la fillette de faire du tricycle dans le couloir. Le syndrome inflammatoire biologique diminue. Au niveau bactériologique, les hémocultures et l’ECBU reviennent négatives. Le prélèvement de gorge montre une flore variée banale. Nous retenons donc le diagnostic de spondylodiscite cervicale axoatloïdienne avec une probable porte d’entrée ORL sans qu’aucun germe n’ait été objectivé. La durée de l’antibiothérapie a été de 6 semaines (2 semaines IV puis 4 semaines per os) avec maintien du collier cervical pendant toute la durée du traitement.

Commentaires

La spondylodiscite est une atteinte infectieuse des disques intervertébraux. Elle est plus fréquente, comme toutes les infections ostéoarticulaires, chez l’enfant que chez l’adulte. Elle peut survenir préférentiellement sur terrain d’immunodépression (déficit immunitaire, diabète, corticothérapie), mais pas nécessairement. La contamination se fait par voie hématogène à partir d’une porte d’entrée infectieuse, le plus souvent ORL ou cutanée, parfois depuis un site opératoire (chirurgie récente). La localisation la plus fréquente est lombaire, l’atteinte d’un disque cervical étant exceptionnelle. Le retard diagnostique est fréquent en raison d’une symptomatologie parfois fruste et non spécifique.

Diagnostic

On distingue plusieurs présentations cliniques selon l’âge :

  • nourrisson : lyses osseuses aboutissant à une cyphose, secondaires à une septicémie ;
  • petit enfant 1 à 4 ans : démarche guindée, boiterie, refus de la station assise, douleurs abdominales dans un contexte fébrile
  • Grand enfant de plus de 4 ans : tableau similaire à celui de l’adulte, avec :
    – fièvre (souvent peu élevée) ;
    – douleur rachidienne avec recrudescence nocturne et raideur constante ;
    – signes possibles de compression médullaire ou radiculaire (stade évolué).
  • La biologie montre un syndrome inflammatoire non spécifique (leucocytose, élévation de la CRP et de la procalcitonine). Les prélèvements bactériologiques sont capitaux, afin d’identifier le germe responsable : plusieurs hémocultures, prélèvement de porte d’entrée (cutanée, ORL, ECBU…). Il est cependant fréquent qu’aucun germe ne soit identifié.
  • La ponction discale radio-guidée est discutée selon les équipes. Certains la préconisent uniquement en cas d’absence d’amélioration sous antibiotiques.
  • Le bilan radiographique comprend initialement des radiographies simples, qui montrent le pincement discal, puis l’érosion des plateaux vertébraux et, plus tardivement, une ostéophytose condensante. • La scintigraphie osseuse peut fournir une orientation.
  • L’IRM est actuellement l’examen de choix pour affirmer le diagnostic, visualiser la gravité et les complications éventuelles.

Traitement

Le traitement associe :

  •  une bi-antibiothérapie prolongée (2 semaines IV, puis 4 semaines per os) visant prioritairement le Staphylocoque et Kingella kingae (ce bacille à gram négatif est actuellement le deuxième germe le plus fréquemment retrouvé dans les infections ostéo-articulaires en pédiatrie) et secondairement adaptée à l’antibiogramme.
  • Une immobilisation rigide par collier ou par corset pendant toute la durée de l’antibiothérapie, au minimum. Des séquelles peuvent survenir, nécessitant une surveillance clinique et si besoin radiographique à distance. Elles vont des douleurs rachidiennes minimes à l’instabilité secondaire par tassements vertébraux, pouvant évoluer vers une cyphose définitive.

Pour en savoir plus

  • Nguyen-Bourgain C et al. Torticolis de l’enfant. Réalités Pédiatriques 2008 n° 128.
  • Garron E et al. Groupe international d’étude des approches intervertébrales du rachis (GIEDA). Les spondylodiscites non tuberculeuses de l’enfant et de l’adolescent : étude rétrospective à partir de 42 cas. Internet 2000.
  • Bourrillon A, Chéron G. Urgences pédiatriques. Collection Urgences, Masson, Paris, 2005.
  • Médecine thérapeutique/Pédiatrie. Janvier-février 2004 ; volume 7 (1) : 8-15.

Source de l’article :

Auteurs : P. CAVALLI, M. TARDY, L. ABID
Service de Pédiatrie, Centre hospitalier général de Firminy
Lien : Journal International de Médecine (21/01/2009) - Réservé aux abonnés.
Copyright © Len médical, Pédiatrie pratique, décembre 2008

Le Site de l’Ostéopathie remercie Pierre Renaudeau de l’avoir autorisé à reproduire cet article.
Le Site de l’Ostéopathie remercie le Journal International de Médecine (JIM) de l’avoir autorisé à reproduire cet article
1re publication sur le SDO le 08-09-2012



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