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Bilan carbone et social de l’ostéopathie ...*

Essai non autorisé
 
Créé le : samedi 19 janvier 2019 par Patrick Chêne

Dernière modificaton le : vendredi 23 décembre 2022

« Ce n’est pas un signe de bonne santé que d’être bien adapté à une société profondément malade. »

Jiddu Krishnamurti ;
Philosophe d’origine indienne, 1895-1986.

Le titre est une invite à répondre à une question que vous ne vous êtes peut être pas posée ...

Et pourtant le mot globalité est censé occuper une grande place dans notre "raisonnement" de soignant en ostéopathie. Mais il y a une acceptation courte : le symptôme douloureux qui, amène le patient Homme ou Animal à consulter n’est que la partie émergée d’un iceberg où la vraie tension anatomique est ailleurs dans son corps.

Nos cours nous ont bien préparé à cette version courte et la tendance lourde de l’ostéopathie vers une reconnaissance voudrait que l’ostéopathie soit celle-là et seulement celle-là : une ostéopathie biomécanique.

Pourtant beaucoup d’entre vous savent que si vous n’incluez pas les émotions et la façon de les vivre dans vos équations il manque un gros morceau à votre soin pour être percutant et durable.

Très peu d’entre nous se donnent le droit d’aller mettre leur nez jusque dans l’air que nos patients respirent, dans les maisons qu’ils habitent, dans la façon dont ils s’insèrent dans la société et enfin dans la société dans laquelle ils évoluent .... Ce n’est pas notre rôle, nous ne savons pas, ne sommes pas habilités ... cloisonnement des différents métiers, cloisonnement de la pensée ... La globalité n’est plus.

Pour continuer à être mieux "global", il conviendrait d’inclure l’ostéopathe dans cette globalité et de lui demander comment il se sent avec ses clients, avec sa façon d’exercer, avec son lieu d’exercice, avec l’administratif de son exercice ... tout cela influençant pour une bonne part la qualité du soin. A chacun d’y répondre selon sa tête et son cœur et de changer de dynamique si les réponses ne sont pas porteuses de sens pour lui.

Sur ce point, je ne peux répondre que personnellement : l’ostéopathie et le soin par les mains et maintenant par la vibration sont pour moi, dans ma pratique de tous les jours, une fenêtre ouverte sur le vivant, sur le bonheur. Chaque fois j’ai tendu vers une ostéopathie qui me parlait mieux et me semblait plus efficace, je regrette juste de ne pas y être allé plus vite par peur de la bien-pensance, par peur du diktat de la bonne façon de soigner. Les seuls épines qui accrochent sont la difficulté à me faire comprendre en quelques phrases dans ce que je vis du soin et une administration globale sans souplesse qui voudrait que tout le monde soit un commerçant, comptable et écrivain besogneux ou bien l’exaspération de vivre dans une société apparemment facile mais qui en fait ne l’est pas et cache sa violence derrière des murs (physiques ou bien des mots). Oui, la plus grosse épine pour moi est cette société qui par certains aspects est magnifique mais n’en est pas moins une machine prédatrice et loin de l’humanisme que l’on m’a vendu à l’école.

Depuis que je suis né les inégalités entre humains se sont renforcées de manière extrême, et la planète et le vivant ont pris un sacré uppercut, du simple temps de ma vie ....cela me questionne fortement. Et si vous avez vu mes commentaires sur facebook [1], alors vous savez que pour moi au présent de notre civilisation "triomphante" je pense qu’il n’y a que deux choses importantes : réduire les inégalités entre humains et nous penser inclus dans la biodiversité pour arrêter de faire des dégâts irréversibles, tout le reste n’étant, à mes yeux,qu’amuse-sots. L’urgence est de sortir d’une organisation pyramidale, pour renter dans une économie circulaire qui fonctionne sur la coopération et non sur la concurrence et cela en incluant le vivant et la terre comme des entités par ailleurs nos égales ... à moins de vouloir continuer à scier la branche sur laquelle nous sommes assis.

Alors effectivement parfois j’ai l’impression en soignant d’écoper un bateau qui coule : tel employé des télécoms qui a mal au dos parce que sa boite appliquant des techniques de plus en plus dures lui demande de faire des actes qu’il ne cautionne pas, telle employée de maison de retraite qui n’en peut plus des cadences, du manque de moyens et de la souffrance qui en découle ...dois je continuer ? Ou bien, soulager une vache élevée dans des conditions de plus en plus hors sol avec de la mauvaise nourriture, à qui on demande une production plus forte de lait et qui craque dans les mains d’un éleveur déprimé parce que le prix de la tonne de lait a encore baissé et que les contraintes règlementaires ont encore augmenté .... Ou bien tel cheval de club, boiteux, pas assez sorti de sa boite et mangeant trop de concentrés parce que la structure n’a pas assez de surface et que près de la ville il faut beaucoup de chevaux pour satisfaire des gens qui ne trouvent leur vital bol d’air que dans l’exercice de l’équitation ...

Mais in fine, pour être global il nous faut quitter l’ostéopathe pour rentrer dans notre corps de profession et s’interroger sur ce qu’il apporte à notre société.

Il est clair qu’avec une médecine manuelle décentralisée et qui demande peu de moyens, nous, les ostéopathes, paraissons alléger le bilan financier, carbone et polluant de la médecine en général. Une lombalgie soignée avec les mains, ce sont des examens complémentaires en moins dont ceux avec rayons X, ce sont des médicaments en moins, donc moins d’effets secondaires, moins de moyens pour les lobbies de l’industrie pharmaceutique, moins d’emballage dans les poubelles, moins de résidus qui ne partiront pas via les toilettes dans l’eau des rivières en augmentant le niveau général de pollution. Il est donc certain de ce point de vue que tout ce que nous faisons va dans le sens moindre emprise du financier et du meilleur respect de la nature, plus vers une action diffuse et circulaire, qu’organisée et pyramidale.

Si par ailleurs, nous allons dans le registre des émotions au lieu de rester dans le mécanique, si en plus nous aidons le patient à cerner la punaise de sa vie qui le bloque dans ses élans et le contrarie ou le rend triste, alors en plus nous avons fait œuvre empathique, sociale et coopérative. Pour un animal, si nous avons pu pointer sur l’incohérence des conditions de vie, de nutrition, de mal être du gardien, alors nous avons aussi fait vraiment du bien à notre prochain et pas simplement remis une pièce en place jusqu’à la prochaine panne ... Et si parfois cette consultation permet à ceux qui en bénéficient de déclencher un rapprochement vers une vie qui les épanouit d’avantage, alors nous avons fait avancer une personne par elle même ou via son animal, mais nous avons aussi fait avancer la société.

Notre cabinet de consultation ne fait pas partie des plus gourmands en électricité, eau, chauffage et matériels couteux.

Nous pourrions avoir décerner du coup à l’Ostéopathie un satisfexit tonitruant, un label éco et socio-responsable ...

Pourtant, il y a un point qu’il nous reste à travailler ... pour venir jusqu’à nous nos clients font le plus souvent de la route, quand ce n’est pas nous qui roulons pour aller les voir. Bien sûr un ostéopathe de grande ville verra des gens qui viennent à pied ou par transport en commun pour la plupart ... mais :

  • un ostéopathe équin fera parfois plusieurs centaine de kilomètres dans sa journée. J’ai moi même fait un temps plus de 2000 km par semaine pour mes tournées.
  • Un ostéopathe dans une petite ville verra ses clients prendre la voiture de façon quasi systématique et si lui ne bouge pas, son activité va générer un bilan carbone moins encourageant. Pour ma part, je me suis rendu compte que si mon lieu de vie était génial, perdu au fin fond de la France, mes clients faisaient en moyenne 50 km pour venir en consultation ...

Alors comment résoudre ce zéro pointé sur ce point ?

  • Demander à mes clients de rouler en voiture biodiesel ? ... non merci, parce qu’à la clé il y a une agriculture industrielle, faite de chimie, D’OGM, de gros tracteurs polluants et une concentration de la production qui donnent de la puissance à des lobbies pas très empathiques.
  • leur demander de rouler en voiture électrique ? Bon, c’est pas mieux, charbon, nucléaire, j’en passe et des meilleures (les pots de vin de l’éolien ; le scandale du photovoltaïque quand les propriétaires s’apercevront qu’ils ont signé un contrat leur donnant la charge de la destruction des cellules en fin de vie ...)

En attendant que l’industrie veuille bien mettre à notre disposition une voiture solaire à 100% et entièrement recyclable, sans obsolescence programmée, il reste à :

  • organiser le covoiturage de nos clients
  • à acheter un cheval et une roulotte et à faire de l’ostéopathie foraine (pas bien vue par les différents ordres ...)

Ou bien est ce qu’en fait le problème n’est pas de vouloir avec les meilleures intentions du monde (savoir-faire ; technicité ; responsabilité) que le soin soit forcément un acte hyper technique qui s’apprenne en plusieurs années ce qui impose que derrière on en fasse une profession pour rentabiliser les années d’études payées parfois avec des emprunts.

Parce qu’en fait, on pourrait imaginer une façon complètement différente de voir le soin manuel. Car si on admet avec facilité que tout le monde (ou presque) a deux mains, que l’on a démontré que le simple toucher bienveillant produit beaucoup d’effet... Alors est ce que l’on ne pourrait pas penser que l’on pourrait tout un chacun apprendre un petit bagage manuel et avec moins de savoir faire et des techniques moins pointues espérer un résultat similaire en plusieurs fois plutôt qu’en une, une intervention plus précoce puisque sans décision d’aller en consultation monétarisée. Il suffirait donc que les massages savants deviennent une institution comme l’apéro et plus besoin de nous ostéopathes en telle quantité et en telle urgence ...

  • Nous pourrions alors nous occuper de notre jardin (de notre terre et de la biodiversité autour de nous, donc de l’urgence absolue des temps qui s’en viennent) avec une ostéopathie intermittente, coopérative et récréative (le rire n’est-il pas aussi un soin ...?).
  • Avec des soins manuels décentralisés en réseaux, ne faisant appel à un professionnel que rarement en cas de difficulté ... et l’on résoudrait collectivement le problème du bilan carbone du déplacement de nos clients ... et si financièrement ce serait la cata, je pense qu’en terme de désespérance devant les animaux matraqués ou les nombreux déprimés cachetonnés nous gagnerions beaucoup d’enthousiasme devant des gens qui s’entre-massent et donc forcément s’interrogent plus eux mêmes sur leur tensions et iront moins loin dans l’auto-destruction

C’est alors que je donnerais à notre profession le label vert et or de l’écologie et d’une société équitable ... Bon ...arrêtez moi si je déconne trop ! Et vous remarquerez pourtant que je suis reste à l’étage matière et que je ne suis pas rentré dans le vitalisme...

Ceci dit pour être encore plus global et me punir de vous encourager vers une société qui se rapproche de " la belle verte" de coline serreau, je vous encourage à me dire que d’écrire de telles divagations sur un serveur à refroidir ne va pas arranger le réchauffement climatique, ni de le publier sur la version papier !

Mais honnêtement est-il possible encore de parler globalité sans finir par s’occuper du globe ? ... Petit globule perdu dans l’immensité de l’espace, grain de vie dans un océan de matière inerte ... un univers où la vie est à dose homéopathique en fait, mais quelle efficacité !

Favoriser les circuits-courts et les outils qui le permettent : voir le dossier : Comment faciliter l’accès aux circuits-courts

[1étonnamment compulsif, tellement les sujets me touchent en ce moment



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