Conseil d’État, 1ère chambre, 30/11/2021, 445126, Inédit au recueil Lebon
Conseil d’État – 1ère chambre
N° 445126 – ECLI:FR:CECHS:2021:445126.20211130 – Inédit au recueil Lebon
Lecture du mardi 30 novembre 2021
Rapporteur M. Pierre Boussaroque
Rapporteur publicM. Vincent Villette
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu les procédures suivantes :
1° Sous le n° 445126, par une ordonnance n° 2009639 du 1er octobre 2020, enregistrée le 6 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le président du tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d’Etat, en application de l’article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête, enregistrée le 6 juillet 2020 au greffe de ce tribunal, de l’association française d’ostéopathie et du syndicat de médecine ostéopathique.
Par cette requête, l’association française d’ostéopathie et le syndicat de médecine ostéopathique demandent au Conseil d’Etat :
1°) d’annuler pour excès de pouvoir la décision, qui leur a été communiquée le 7 mai 2020, arrêtant la liste des organisations professionnelles déclarées représentatives par le ministère des solidarités et de la santé en 2020 ;
2°) d’enjoindre au ministre des solidarités et de la santé d’organiser une nouvelle enquête de représentativité, en communiquant préalablement les critères et les barèmes précis d’évaluation de cette représentativité, dans le délai d’un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros, à verser à chacun d’entre eux, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 445127, par une ordonnance n° 2009414 du 1er octobre 2020, enregistrée le 6 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le président du tribunal administratif de Paris a transmis au Conseil d’Etat, en application de l’article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête, enregistrée le 2 juillet 2020 au greffe de ce tribunal, présentée par le syndicat Chambre nationale des ostéopathes.
Par cette requête, la Chambre nationale des ostéopathes demande au Conseil d’Etat d’annuler pour excès de pouvoir la décision, dont elle a été informée le 7 mai 2020, arrêtant la liste des organisations professionnelles déclarées représentatives par le ministère des solidarités et de la santé en 2020.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
– le code des relations du public avec l’administration ;
– le code de la santé publique ;
– la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;
– le décret n° 2020-518 du 4 mai 2020 ;
– le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
– le rapport de M. Pierre Boussaroque, conseiller d’Etat,
– les conclusions de M. Vincent Villette, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes de l’association française d’ostéopathie et du syndicat de la médecine ostéopathique, d’une part, et de la Chambre nationale des ostéopathes, d’autre part, sont dirigées contre la même décision. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
2. Il ressort des pièces des dossiers qu’à la suite d’un avis publié au Journal officiel de la République française du 23 mars 2019 organisant une enquête de représentativité au sein de la profession d’ostéopathe, les organisations qui s’étaient portées candidates dans le cadre de l’enquête de représentativité ont reçu, le 7 mai 2020 un courriel expédié par Mme C… D…, dont la fonction n’est pas précisée, et mentionnant en pied de page ” DGOS – Bureau de la démographie et de la formation initiale RH1 ” auquel était joint un document, ne comportant ni date, ni indication de son auteur, ni signature, intitulé ” ostéopathes : les organisations professionnelles déclarées représentatives par le ministère en 2020 “.
3. Si le ministre des solidarités et de la santé affirme que ce document ne ferait que révéler la décision qui aurait été prise sous une forme non écrite par la sous-directrice des ressources humaines du système de santé, il n’apporte aucun élément au soutien de cette allégation, qui ne ressort pas davantage des pièces des dossiers. Dès lors, et en tout état de cause, la décision arrêtant la liste des organisations professionnelles d’ostéopathes représentatives par le ministère des solidarités et de la santé en 2020 doit être regardée comme ayant été adoptée par Mme C… D…, qui ne disposait pas d’une délégation de signature pour l’édicter au nom du ministre chargé de la santé. Il suit de là que l’association française d’ostéopathie et le syndicat de la médecine ostéopathique sont fondés à soutenir que la décision qu’ils attaquent a été adoptée par une autorité incompétente et à en demander, pour ce motif et sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des requêtes, l’annulation pour excès de pouvoir.
4. Aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : ” Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution (…) “.
5. L’annulation prononcée par la présente décision n’implique pas nécessairement que le ministre des solidarités et de la santé organise une nouvelle enquête de représentativité des ostéopathes en vue de désigner les organisations professionnelles représentatives de cette profession. Les conclusions à fin d’injonction présentée à cette fin par l’association française d’ostéopathie et le syndicat de la médecine ostéopathique ne peuvent donc qu’être rejetées.
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros à verser, d’une part, à l’association française d’ostéopathie et, d’autre part, au syndicat de médecine ostéopathique, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La décision arrêtant la liste des organisations professionnelles d’ostéopathes déclarées représentatives par le ministère des solidarités et de la santé en 2020 est annulée.
Article 2 : L’Etat versera à l’association française d’ostéopathie et au syndicat de médecine ostéopathique une somme de 1 500 euros chacun au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de l’association française d’ostéopathie et du syndicat de médecine ostéopathique est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l’association française d’ostéopathie, au syndicat de médecine ostéopathique, au syndicat Chambre nationale des ostéopathes et au ministre des solidarités et de la santé.
Délibéré à l’issue de la séance du 5 novembre 2021 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d’Etat et M. Pierre Boussaroque, conseiller d’Etat-rapporteur.
Rendu le 30 novembre 2021.
La présidente :
Signé : Mme Gaëlle Dumortier
Le rapporteur :
Signé : M. Pierre Boussaroque
La secrétaire :
Signé : Mme A… B…